revomega
La cameline, une ressource végétale riche en oméga 3 mais pas que…

La cameline, une ressource végétale riche en oméga 3 mais pas que…

Les évolutions liées à l’accroissement et au vieillissement de la population mondiale rendent nécessaires la production en quantité de protéines et lipides de bonne qualité nutritionnelle. Optimiser les modes de production agricoles et de transformation en vue de limiter leur impact environnemental est également nécessaire. La graine de cameline est une graine oléagineuse riche en acides gras polyinsaturés oméga 3 et est donc principalement utilisée pour la production d’huile. Elle présente toutefois d’autres composés d’intérêt nutritionnel, notamment des protéines. La production de graines de cameline demande peu d’intrants et la plante est peu sensible aux ravageurs. La cameline présente donc de nombreux atouts pour répondre à l’augmentation de la demande en protéines et lipides de qualité, mais comme la plupart des sources de protéines végétales, sa graine contient des facteurs pouvant affecter le goût et la digestibilité. Dans le cadre d’un projet interdisciplinaire, les chercheurs ont sélectionné quelques variétés de cameline permettant d’optimiser la composition de la graine et l’extraction de ses protéines afin d’en évaluer leur valeur nutritionnelle. Ce projet visait également à mieux valoriser l’ensemble des coproduits obtenus après extraction de l’huile des graines de cameline.

Les atouts et limites de la graine de cameline

La cameline présente des caractéristiques prometteuses telles que sa résistance aux stress, son faible besoin en intrants et son cycle de culture court.

La graine de cameline est une ressource d’acides gras oméga 3. Elle est également riche en protéines (environ 25%) et en composés bioactifs (phytostérols, tocophérols…). Elle contient aussi environ 7% de fibres solubles qui forment du mucilage après hydratation. Le mucilage possède d’excellentes propriétés viscoélastiques et pourrait être utilisé comme épaississant et stabilisant naturel dans l’alimentation. Néanmoins, la graine contient également des composés, tels que les glucosinolates, dont les teneurs sont réglementées en raison de leur potentiel effet antinutritionnel à doses élevées. Contrairement à d’autres Brassicaceae, la cameline présente de nombreux intérêts agronomiques. Elle peut être utilisée en culture de couverture et peut aussi pousser en culture associée avec des pois et des lentilles. Sa culture demande peu d’eau, peu d’intrants et est peu sensible aux ravageurs.

La valorisation des produits de la cameline répond à des enjeux de santé, des enjeux environnementaux, des enjeux agronomiques, et des enjeux techniques.

Sélection de variétés pour une meilleure valorisation des coproduits

Valoriser les produits issus de l’extraction de l’huile nécessite de sélectionner des variétés répondant à un équilibre entre atouts et limites de la cameline. Dans le cadre d’un projet interdisciplinaire, les chercheurs ont sélectionné six variétés avec une concentration élevée de composés à haute valeur nutritionnelle et une faible teneur en facteurs antinutritionnels. Des procédés de déstructuration des graines ont été adaptés et améliorés pour optimiser le rendement d’extraction. Des analyses ont ensuite permis de caractériser la diversité des métabolites présents dans les fractions et extraits. Il a été observé que le mucilage pouvait présenter des métabolites secondaires, potentiellement antinutritionnels.

L’intérêt des protéines de cameline comme source alimentaire de protéines a été également exploré grâce à l’obtention d’un extrait protéique concentré à partir de tourteaux issus d’une variété rustique utilisée par un collectif de producteurs puydômois. Cet extrait a été testé suivant un protocole internationalement standardisé pour évaluer la valeur biologique d’une protéine chez le jeune rat. Malgré une croissance des animaux faiblement perturbée, la digestibilité, l’utilisation protéique et la valeur biologique des protéines de cameline étaient diminuées par rapport à la caséine (protéine animale de référence). Cela pourrait être lié à une légère carence en lysine (les teneurs des autres acides aminés essentiels étant très favorables) ou à la présence de certains facteurs anti-nutritionnels.

Il faut encore lever certains verrous technologiques et identifier des pistes de valorisation

Il existe très peu de données sur les pratiques de cultures et les modèles d’affaires des acteurs économiques de la filière. Le volume des ventes, les superficies cultivées et la valeur économique du marché de la cameline en France sont des données inexistantes. La filière est très peu connue des consommateurs et le marché est essentiellement tourné vers l’huile avec sa teneur en oméga 3 comme argument majeur.

L’impact de la diversité variétale du changement climatique sur la composition de la graine reste mal connu. Il est nécessaire de réduire les facteurs antinutritionnels dans les extraits riches en protéines et d’identifier des perspectives pour d’autres coproduits tels que le mucilage.

Un nouveau projet de recherche financé dans le cadre de France 2023, Oléoprotid, va permettre de mener des essais de résistance à différents stress climatiques sur différentes variétés de cameline pour étudier l’impact sur la teneur en protéines et en composés antinutritionnels de la graine. Des essais d’extraction de protéines sur différentes fractions de la graine permettront de développer un premier prototype de produit fermenté contenant de la cameline. La biodisponibilité des protéines et le risque d’allergie seront également évalués. La perception par les consommateurs sera également explorée.

 

Contact : Frédéric Capel

Le projet REVOMEGA a fait l’objet d’un financement par le métaprogramme SYALSA. Il implique les unités UNH, LCA, MOISA, Agronomie et IJPB.